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L’harmonisation des conditions d’octroi des agréments enfin mise sur la table

Affaires - Sociétés et groupements
16/12/2021
Bruno Questel et Cécile Untermaier ont rendu leurs conclusions le 8 décembre 2021 quant à la mission « flash » qui leur avait été confiée sur la capacité à agir en justice des associations. Ils se sont concentrés sur l’action des associations devant le juge pénal. Voici leurs propositions.
Du rôle complémentaire des associations devant le juge pénal

Les auditions menées par les deux rapporteurs ont, de prime abord, permis d’asseoir l’utilité de l’action des associations devant le juge pénal. Elles sont perçues comme un réel partenaire du parquet dans plusieurs domaines techniques, dans lesquels les magistrats du siège n’ont pas les moyens de mener leurs investigations (environnement, santé, droit pénal humanitaire etc…). Elles ont, en outre, permis de sanctionner certaines infractions, là où les magistrats du parquet pouvaient parfois s’autocensurer (positionnement politique délicat, objectifs de carrière notamment).
Après ce premier constat, qui venait légitimer ces actions en justice de la part des associations, la problématique de l’octroi et du renouvellement des habilitations et des agréments a été soulevée.

De l’harmonisation des habilitations et agréments des associations

Pour rappel, les associations ne peuvent agir en justice au pénal en défense d’intérêts collectifs que si elles y sont habilitées. De nombreuses habilitations existent aujourd’hui, au sein du code de procédure pénale et dans de nombreux autres textes épars.
Il a été souligné que les habilitations des associations étaient très hétérogènes, quant à leur champ d’action, à l’ancienneté requise pour l’obtenir, leur possibilité d’agir par voie d’action ou d’exception, l’obtention nécessaire ou pas de l’accord préalable de la victime, et parfois la condition rédhibitoire de l’agrément, comme en matière de lutte contre la corruption ou de défense de l’environnement.
Même s’il a été reconnu que l’agrément a facilité le traitement des plaintes des associations en ces domaines, elles ont toutefois signalé des difficultés : la lenteur et la lourdeur des procédures, le manque de transparence de l’instruction et le manque de communication de la part des autorités délivrant l’agrément, et, spécifiquement pour les associations de lutte contre la corruption, les problèmes d’impartialité. La lenteur du renouvellement d’un agrément au cours d’une procédure est également à l’origine d’une grande insécurité juridique. Par ailleurs, quant aux agréments, des anomalies ont pu être détectées, au nombre desquelles la durée de l’agrément.
Aussi, M. Questel et Mme Untermaier ont proposé les ajustements suivants :
— harmoniser l’ancienneté requise des associations candidates à un agrément à 3 ans (sauf pour les associations de victimes d’accidents, qui se constituent après l’accident) ;
— harmoniser la durée de l’agrément à 5 (pour M. Questel) ou 7 ans (pour Mme Untermaier) ; sur ce point, ils ont pu mettre en avant l’incapacité de l’administration à gérer les demandes de renouvellement tous les 3 ans et l’obligation des associations de transmettre chaque année à l’administration certains documents lui permettant de suivre l’activité de l’association ; néanmoins, en contrepartie, ils ont souligné la nécessité de mieux encadrer le retrait le de l’agrément (conditions et procédure).
 
De la prévention des conflits d’intérêts

En outre, a été relevée la crainte d’un détournement de l’habilitation des associations à agir en justice pour servir des intérêts politiques ou économiques. Aussi, pour prévenir les conflits d’intérêts, est envisagé d’étendre au président, vice-président et trésorier des associations l’obligation de soumettre une déclaration d’intérêts à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. Elle ne serait pas rendue publique. À la différence de M. Questel, Mme Untermaier souhaiterait toutefois limiter cette obligation aux associations de lutte contre la corruption, celles-ci étant les principales concernées par les risques de conflits d’intérêts.

La question sépcifique des association anti-corruption

Enfin, la demande de renouvellement d’agrément par l’association Anticor avait suscité des interrogations sur la procédure à suivre quant à la demande initiale d’agrément des associations anti-corruption. M. Questel et Mme Untermaier ont transmis des propositions spécifiques en ce qui concerne ces associations. Pour en savoir plus sur ce point, voir Capacité d’ester en justice des associations anticorruption : qui doit octroyer l’agrément ?, Actualités du Droit, 9 déc. 2021.

 
Pour aller plus loin
Pour en savoir plus sur l’action des associations en défense d’intérêts collectifs pour des faits constitutifs d’une infraction pénale, voir le Lamy Associations, études 238 et 239.
Source : Actualités du droit